Le concours «Little Box Challenge », lancé en juillet 2014 par Google, en partenariat avec le très officiel Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE),  a été attribué fin février dernier, à une PME de Liège en Wallonie. Derrière l’enjeu du prix à 1 million de dollars, celui d’inventer un onduleur très compact, l’appareil qui transforme le courant continu en alternatif, c’est Google qui fait la démonstration de sa stratégie ubiquitaire à s’imposer sur le marché de l’équipement électrique.

Pourquoi la filière électrique européenne n’a pas eu cette idée, notamment ses géants énergéticiens ? Réunir 1 million de d’euros, s’associer à une institution des professionnels de l’électricité et lancer un défi à tout professionnel du secteur, universités, PME, multinationales ou simple ingénieur-inventeur dans le garage familial, voilà qui n’est pas sorcier à mettre en place. Surtout, en cette période de transition énergétique, s’attaquer au produit central d’un bâtiment intelligent, l’onduleur qui fait l’interface entre l’énergie renouvelable et le courant alternatif.

A idée ingénieuse, bénéfice inestimable et d’abord en termes d’image sur différents points. En s’associant à l’IEEE pour l’expertise du concours et à l’Institut de l’Energie de l’administration américaine pour son accueil, le moteur de recherche fait la démonstration de la nouvelle puissance du pays de Thomas Edison, en matière de R&D de l’équipement électrique. Une puissance en R&D qui devient inégalée, grâce à la fluidité américaine des relations entre monde de l’entreprise et campus universitaires.

« Little Box Challenge » ébranle la suprématie des équipementiers électriques européens

Pour Google, cette puissance yankee est incarnée par l’académicien-informaticien John Hennessy qui, à la fois, siège au conseil d’administration du moteur de recherche et préside l’Université de Stanford (début mars il était en tournée en France pour lancer son fonds de 750 millions de dollars, pour attirer à Stanford « la nouvelle génération de leaders mondiaux »). Assister, le matin, à une réunion au siège d’une des sociétés les plus capitalisées au monde, et présider, l’après-midi, une réunion d’enseignants de la deuxième université au classement mondial de Shanghai, voilà qui confère à un seul homme, une influence sans équivalent.

De facto, et dans l’esprit des initiatives de Google, le concours « Little Box Challenge » ébranle la suprématie des équipementiers électriques européens, qui jusque-là s’imposaient, même aux USA, pour la qualité de leurs produits. On est loin de l’époque de l’Exposition universelle de Chicago de 1893, où la fine fleur des ingénieurs français, se déplaçaient au bord du Mississippi, afin de tester la fiabilité des interrupteurs, prises électriques et autres produits Made In America.

Un onduleur de la taille d’une cannette de bière

Plus d’un siècle plus tard, lors d’un Congrès sur l’énergie organisé à Washington, le 29 février dernier, par Google et l’IEEE, c’est la PME Belge de Liège CE+T Power qui brandit le trophée « Little Box Challenge » tant convoité, depuis juillet 2014, par la fine fleur des laboratoires des multinationales de l’équipement électrique. Véritable pied-de-nez à ces derniers, puisque la PME en question a même réussi à recevoir un coup de main de la Région de Wallonie, à hauteur de 250 000 euros, pour développer son onduleur de la taille d’une cannette de bière. Ce qui fait dire à son administrateur délégué, Robert Eyben : « «Par cette innovation, nous allons changer l’avenir de l’électricité, la puissance et même la technologie domestique intelligente.».

Ainsi, avec « Little Box Challenge » Google venait de bouleverser la philosophie de la R&D dans les entreprises. A l’heure de la convergence énergie/numérique, le temps n’est plus à la R&D intra-muros, aux chaires unilatérales avec les universités, mais au défi mondialisé et ouvert au-delà des filières mono-industrielles. Dans quelques mois, années, nous allons voir si l’onduleur liégeois aura bouleversé l’avenir de l’électricité, mais nous sommes déjà certains que Google a inscrit en grand, son nom dans les annales de l’histoire de la filière des équipements électriques.