Au lendemain du vote à l’Assemblée nationale de la loi sur la transition énergétique s’ouvrait le salon Smart Grids Paris avec Jeremy Rifkin au programme. Ils n’ont été que 2 300 visiteurs sur trois jours, et au regard des plus de 500 000 professionnels du secteur de l’énergie en France, le futur s’annonce incertain.
Il y a 110 ans, la comtesse Greffulhe convainc le patron du journal Le Matin, d’organiser sur la place du Trocadéro, une présentation de la dernière découverte d’Édouard Branly, la télémécanique sans fil. C’était un 30 juin 1905, et des milliers de personnes se sont bousculées pour 5 000 places, afin d’assister à l’expérimentation. Il y avait des ambassadeurs, des hauts fonctionnaires, les gradés de l’armée et le peuple de Paris. On pouvait même croiser Marcel Proust.
Un siècle après, les Francais et même les professionnels ne se bousculent plus dans les salons où l’innovation dans le domaine énergétique prend toute sa dimension. Il y a une réalité qui ne trompe pas, ces trente dernières années, le secteur des industries électriques a complètement délégué les questions de communication à des agences qui sont plus formatés aux techniques de l’information promotionnelle, qu’aux métiers du journalisme et à ses secrets tels l’intuition, la vérification des sources, le témoignage, le reportage…, et surtout d’avoir cette faculté de bien servir et objectivement le lecteur.
Ainsi, la loi de Ségolène Royal se trouve sans évangile pédagogique, obligatoirement portée par des communicants experts en lobbyisme politique, des as de la communication institutionnelle. Dans un tel univers on nous offre pas une transition énergétique qui fait rêver les Français, notamment par les rencontres historiques entre l’univers du numérique et de l’énergie. La ministre du digital Axelle Lemaire peut bien expliquer avec humour que nous vivons une double transition, énergétique et numérique, mais ne reste que, coté électriciens, des thèmes comme les objets connectés qu’on annonce par milliards, les smart buildings, smart grids et smart cities…, qui sont loin d’être des sujets qui suscitent l’intérêt ou l’excitation, comme les innovations électriques durant les expositions universelles à Paris, il y a plus d’un siècle.
Pourtant, rien que dans le domaine de l’éclairage, nous sommes en train de vivre des bouleversements historiques de l’accès à la lumière intelligente. On raconte qu’il y a un siècle, une expérimentation dans un château pour découvrir les merveilles des lampes incandescentes à provoquer sur l’assistance un effet inattendu. Les belles dames s’étaient maquillées comme veut la tradition pour être éclairées aux chandelles. Lorsque l’organisateur alluma les lampes, elles ont découvert que leurs poudres donnaient visuellement une autre perception et toutes se sont bousculées pour quitter les lieux. A ce jour, il ne semble pas que les évènements autour du smart linghting ont provoqué de telles réactions ou des émerveillements.
Si on intégre la transition énergétique dans le concept en développement qui est la ville intelligente, on peut constater que le débat est beaucoup plus inscrit dans une communication journalistique en Inde qu’en France, où le promotionnel et le commentaire occupe l’espace médiatique et l’emporte sur le reportage. Ce dernier n’est pas un outil que maitrise les publications des entreprises des industries énergétiques. Il est pourtant, pour la France, l’outil où, par le récit et la narration, il a été donné, depuis plus d’un siècle, aux électriciens et énergéticiens de visualiser le pays et ses territoires dans son électrification.
A l’aune de l’avènement d’un territoire francais intelligent grâce à la convergence énergie-numérique, il est plus que dommage que la transformation électrique du pays, région par région, département par département et commune par commune, ne soit pas accompagnée par des récits à lire qui feront de la France un modèle de transition énergétique. On sera alors certains de voir des électriciens se bousculer sous l’Arche de la Défense pour assister à des expérimentations qui vont bouleverser leur métier.
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