Le projet de loi de Ségolène Royal repose plus sur « l’état initial » du fonctionnement énergétique français que sur « la théorie du constructeur » qui ouvre sur les perspectives du « possible ». En 1998, une loi sur les Télécoms a rapidement volé en éclat face à l’innovation. Celle de Royal saura-t-elle protéger « l’état initial » de la production, distribution et consommation électrique ?
Comment va évoluer le secteur des industries énergétiques à l’horizon 2020/2030 et la loi Royal en préparation anticipe-t-elle les bouleversements à venir ? Il semble que non. Nous sommes, avec le secteur énergétique, dans la même configuration qu’avec l’avènement des réseaux Internet durant les années 90 et début 2000. Il y avait cette montée en puissance durant les années 80 des outils informatiques, permettant au public un large accès à l’appareil informatique.
Aujourd’hui et de par la règle de la loi de Moore qui définit le doublement tous les 18 mois de la force numérique, l’ordinateur n’est plus un équipement de bureau ou domestique connecté à l’aide d’un câble et d’un modem, mais bien, un écran tactile mobile et transportable dans les endroits les plus improbables.
Comment allons-nous vivre notre énergie en 2020 ou en 2030 ? On connaît les souhaits des politiques : pour des raisons environnementales, ils veulent réduire la consommation des énergies fossiles et prôner l’efficacité énergétique ; pour des raisons sociales, ils veulent favoriser la réduction du prix de l’énergie et pour les questions de soutiens économiques, ils veulent développer les équipements intelligents.
En pratique, il n’est pas dit que c’est un processus sans rupture sociale, culturelle et industrielle qui va accompagner la transition énergétique française. Dans la mémoire collective des énergéticiens, la France demeure une grande puissance mondiale de leur secteur, à l’exemple de France Telecom, à la fin des années 80 et début 90. Mais, à la faveur d’une politique offensive du vice-président Al Gore, les USA ont pris une longueur d’avance lorsque la communication IP à travers un PC ou un Mac a remplacé le Minitel de papa.
Dans l’énergie, rares sont ceux qui s’aventurent encore en France vers « la théorie du constructeur » comme l’industriel Philippe Rosier qui écrit dans un article d’un ouvrage dédié au sujet : « La transition énergétique doit stimuler notre capacité d’entreprendre ». Faudra-t-il alors s’attendre à l’avènement d’un Steve Jobs énergéticien français qui par une vision révolutionnaire de notre consommation énergétique imposera par l’innovation « disruptive » de nouveaux modèles économiques dans l’énergie ?
Aux États-Unis, la question des innovations disruptives fait un grand débat actuellement entre les militants et les autres, entre ceux qui considèrent qu’une grande rupture n’apporte souvent que de nouveaux produits, des gadgets, mais cause des dégâts dans les écosystèmes établis du confort et du bien-être civilisationnel.
L’Autrichien Joseph Aloys Schumpeter a défini, au début du siècle dernier, le disrupteur qui s’est incarné ces 20 dernières années dans la figure de Steve Jobs. Il a bien expliqué le caractère de ce type d’entrepreneur dont la volonté est de réunir des éléments nouveaux, propres à bouleverser les modèles économiques établis et l’échelle des valeurs.
L’Autrichien a ainsi conceptualisé cette notion qui fait le socle de l’économie numérique avec la formule « processus de destruction créatrice ». Après avoir imposé sa loi économique via Internet au secteur, des médias, de l’hôtellerie, des taxis et même de la finance avec le Bitcoin, l’innovation « disruptive » épargnera-t-elle les acteurs industriels de la transition énergétique française ?
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