Le producteur allemand d’énergies E.ON se sépare de ses activités gaz, charbon et nucléaire pour se concentrer sur les énergies renouvelables. Une annonce qui va laisser des traces dans le monde feutré des industries traditionnelles.

Le 1er décembre dernier, le producteur allemand d’énergies E.ON annonçait sa volonté de se séparer de ses centrales nucléaires, au gaz et au charbon, pour se concentrer sur les renouvelables. L’annonce devrait laisser des traces dans le secteur.

De fait, c’est une pratique plus commune aux géants de la high-tech de la Silicon Valley de stopper une activité ou d’arrêter une offre. Il faut se souvenir du retour de Steve Jobs à la tête d’un Apple en crise, en 1996, pour comprendre ce qui est en train de se jouer dans le secteur des industries de l’énergie. À l’époque de l’Internet balbutiant, la société emblématique de la micro-informatique des années 80 ne répondait plus aux souhaits d’une clientèle mondialisée qui attendait de pouvoir faire le grand saut dans la planète du réseau des réseaux. Steve Jobs était revenu pour faire passer les Mac de machines à disquettes, à des objets connectés au design désirable. L’iMac naissait alors en 1998 et le succès fut celui qu’on lui connait.

Rupture radicale

Il semble que ce soit la même rupture radicale à laquelle on assiste dans le secteur des industries de l’énergie. À l’heure où les Allemands découvrent, en Bavière, un village qui produit un surplus de 320 % d’énergie renouvelable, qui lui fait gagner 5,7 millions de dollars à la revente au profit des finances municipales, il semble que le système centralisé de production, transport et distribution de l’électricité ne soit plus la norme.

Par aveuglement ou crainte de remise en cause d’habitudes, d’intérêts industriels, ils sont nombreux en Allemagne comme en Europe à ne pas comprendre ce changement disruptif du principal énergéticien germanique. Certains mettent ce grand saut d’E.ON dans l’inconnu sur le dos de difficultés financières importantes de l’entreprise. Mais c’est mal connaître les bouleversements actuels subis par l’impact violent des nouvelles technologies sur l’industrie énergétique.

Johannes Teyssen, président du directoire d’E.ON, a ainsi déclaré, au lendemain de la scission de l’entreprise : « Le modèle d’un large éventail d’activités ne correspond plus aux défis nouveaux. Nous voulons nous repositionner de manière radicale ». On est loin du patron énergéticien qui signait en août 2010 l’appel Energiepolitischer Appell, concernant la politique énergétique de son pays, demandant avec 40 autres signataires le prolongement de la vie des centrales nucléaires allemandes.

Certainement aujourd’hui, le choix des responsables E.ON est dicté par la politique d’Angela Merkel qui impose à marche forcée, depuis 2011 et le drame de Fukushima, un nouvel agenda pour sa politique énergétique. Mais il ne faut pas minimiser la rapidité de l’adaptation des Allemands à cette politique, favorisée par sa kyrielle de producteurs d’énergie. Avec la production d’une électricité produite et consommée localement, on assiste à un changement de paradigme qui exige des industries de l’énergie une remise en cause inéluctable.