(14 janvier 2014) Le CES de Las Vegas, suivi de l’annonce de l’achat par Google de la start up Nest Labs, ont tenu toutes les promesses d’une actualité américaine des offres domotiques mondialisées. Mais pour que ce dernier mot ait encore un sens, il faut que l’Europe et la France surtout, retrouvent le génie des expositions universelles du XIXème siècle.
Le 7 janvier, cela n’a échappé à personne que la vedette de l’ouverture du CES (Consumer Electronic Show) de Las Vegas, était bien John Chambers, le CEO de Cisco. On pouvait deviner que lorsque le patron du leader mondial des d’infrastructures de mise en réseau informatique, a abordé le thème de l’efficacité énergétique de l’éclairage urbains, bien des industriels européens de la lumière étaient agacés. Comment ce roi américain des logiciels pouvait se permettre, chez lui, et avec jubilation d’expliquer que : « …l’année dernière le coût énergétique de l’éclairage des rues a été de 13 milliards de dollars, et que demain, en utilisant les technologies connectées on pouvait réduire de 70% la consommation énergétique des lampadaires dans les villes… »?
Il faut comprendre qu’à la faveur de la convergence entre l’électricité et les technologies de l’information, Cisco entretient, depuis plusieurs années l’intention de s’imposer face aux géants énergéticiens européens. L’équipe de John Chambers, chargée du secteur énergétique, n’était-elle pas présente avec force au salon du Conseil International des Grands Réseaux Electriques (CIGRE 2012) qui se tient toutes les deux ans à Paris, depuis 1921 ?
Ainsi, à l’heure où le CES de Las Vegas ouvre d’année en année sa programmation vers le monde de la convergence énergie/numérique. Où un géant du web comme Google, prend du jour au lendemain pied, dans la domotique en achetant une start up aux produits d’un design redoutable pour l’industrie traditionnelle du secteur. L’Europe, et surtout la France en premier, doit nécessairement s’interroger sur son leadership historique concernant les expositions autour des industries électriques. « …Nos ingénieurs ne sont ni moins compétents dans la conception des appareils, ni moins habiles à les exécuter, mais l’esprit public dans notre pays a plus d’hésitations, et les habitudes sont moins faciles à modifier. L’expérience du Nouveau Monde ne doit pas rester sans profit », écrivait dans son rapport consacré à la partie électricité de l’exposition internationale de Chicago de 1893, M. E. Mascart, membre de l’Institut et directeur du Bureau central météorologique.
A juste titre, on ne peut ignorer que la première exposition universelle spécialisée durant le XIXè siècle, a été consacrée à l’électricité et a eu lieu à Paris en 1881. Sous l’autorité du génial homme des arts et de l’industrie, Georges Berger, on pouvait découvrir sur les berges de la Seine, les objets connectés de l’époque, la voiture électrique de Gustave Trouvé, la dynamo de Zenobe Gramme, les ampoules électriques de Thomas Edison, le tramway électrique de Werner Von Siemens, le téléphone d’Alexandre Graham Bell et enfin, le Théâtrophone de Clément Ader. Ce dernier, pionnier de l’aviation, a, pour satisfaire sa passion du vol, créé un objet connecté entre l’Opéra de Paris et les mélomanes. C’est cela le Théâtreophone.
La civilisation de l’électricité devient alors une affaire française. Il y a eu l’exposition de l’électricité à Marseille en 1908, qui sera suivie en 1925 de celle de Grenoble avec pour enseigne « Houille blanche et tourisme, utilisation de l’électricité » qui consacra la capitale du Dauphiné, comme haut lieu des sciences de l’énergie. Quant aux Etats-Unis, ils attendront 1982 et l’exposition de Knoxville avec pour titre « Energy turns the World » pour retrouver une place parmi les nations innovantes dans le secteur énergétique.
Les objets connectés présentés au CES (Consumer electronic show) de Las Vegas sont tous consommateurs d’énergie électrique. Et cette dernière est une des rares industries où la production ne permet aucune défaillance, technique ou humaine. Georges Berger, en organisant son évènement de 1881, en avait conscience, puisque aux objets connectés de l’Exposition au Palais de l’Industrie, il organisa au Trocadéro le premier Congrès consacré aux électriciens.