De la plume au courant électrique, Edouard Estaunié, romancier émérite et ingénieur polytechnicien, a tracé son parcours entre les mondes littéraire et scientifique. Son héritage se cristallise dans un ouvrage révolutionnaire, « Traité pratique de télécommunication électrique » (1904), témoignant de sa double vie d’écrivain et d’homme de sciences. Plongeons dans le portrait de cet illustre Français, témoin d’une époque où la plume et le courant électrique se croisaient sur la toile de la modernité.
Edouard Estaunié, né le 4 février 1862 à Dijon, incarne l’alliance harmonieuse entre la plume et l’électricité. Issu d’une famille bourgeoise aisée, il forge son intellect à travers une éducation chez les Jésuites à Dijon avant de s’installer à Paris pour approfondir ses connaissances. Cette double passion, pour la littérature et les sciences, trouve son équilibre dans une trajectoire singulière.
Diplômé de l’École polytechnique et de l’École libre des sciences politiques, Estaunié se consacre à une carrière au sein de l’administration des Postes et Télégraphes. Dès 1886, il devient ingénieur des Postes et télégraphes, gravissant les échelons jusqu’à diriger l’École d’application du ministère et devenir inspecteur général des Télégraphes. Son empreinte sur l’histoire des télécommunications françaises est indéniable, marquée par la reconstruction du Central Téléphonique de Paris Gutenberg après l’incendie de 1908.
Pourtant, son génie ne se limite pas aux fils électriques et aux circuits téléphoniques. En parallèle à sa carrière d’ingénieur, Edouard Estaunié s’illustre comme romancier. Ses premiers ouvrages, tels que « Un Simple » et « Bonne Dame, » datant de 1891, offrent des tableaux de mœurs dans la France provinciale, inscrits dans la mouvance naturaliste de l’époque. Toutefois, une évolution narrative se dessine, marquée par un intérêt grandissant pour les non-dits et les silences, lesquels deviennent le creuset de la psychologie humaine.
L’anticléricalisme affleure dans « L’Empreinte » (1896), une satire de la vie dans un collège de Jésuites, témoignant de l’engagement intellectuel d’Estaunié. Au fil de sa carrière littéraire, il devient le peintre mélancolique de la bourgeoisie, explorant les drames enfouis derrière les apparences sociales.
Installé dans sa maison de campagne à Saint-Julia-de-Gras-Capou, dans le Lauragais, Estaunié écrit une grande partie de son œuvre, contribuant également à plusieurs revues littéraires françaises. Sa plume, à la fois fine psychologue et moraliste, façonne des récits empreints de la détresse humaine, comme le souligne Robert de Flers.
En 1923, l’Académie française accueille Edouard Estaunié dans son enceinte, reconnaissant ainsi son apport exceptionnel à la littérature. Parallèlement, il assume la présidence de la Société des gens de lettres entre 1926 et 1929. Cet homme aux multiples facettes s’éteint le 1er avril 1942, laissant derrière lui un héritage littéraire et scientifique unique.
L’apogée de sa carrière scientifique se cristallise en 1904 avec la publication de son ouvrage visionnaire « Traité pratique de télécommunication électrique. » Dans ce traité, Estaunié explore minutieusement les organes constitutifs d’une télécommunication électrique, de la production d’énergie électrique à l’application des principes à des appareils télégraphiques usuels.
En six chapitres détaillés, il dévoile les secrets des générateurs de courant continu et alternatif, des transformateurs, des transmetteurs et récepteurs, jusqu’à l’application concrète des principes dans des appareils tels que l’Appareil Morse, l’Appareil Hughes, le Secteur Baudot, le Wheatstone, et le Siphon Recorder. Chaque section est un témoignage de la maîtrise d’Estaunié dans le domaine des télécommunications électriques.
Aujourd’hui, cet ouvrage demeure une référence précieuse pour les étudiants et les chercheurs intéressés par l’histoire des télécommunications. Pour les curieux de cette époque charnière entre la plume et l’électricité, le « Traité pratique de télécommunication électrique » est accessible sur la base du Conservatoire numérique des Arts et Métiers, permettant ainsi à chacun de plonger dans l’univers foisonnant d’Edouard Estaunié. Ce lien avec le passé, entre romans et circuits électriques, éclaire l’empreinte indélébile de cet homme exceptionnel sur l’histoire littéraire et technologique française.
Document: « Traité pratique de télécommunication électrique »